Cuivre : situation des USA en juillet 2025


Executive Summary (résumé)
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Graphe de relation généré par Datafalk Engine sur les parties prenantes tirées de l'article
Introduction
Ce chapitre examine la situation des États-Unis face à leur approvisionnement en cuivre en juillet 2025. Trois dynamiques structurantes s’en dégagent :
- une dépendance persistante au cuivre raffiné étranger,
- des capacités de traitement nationales largement insuffisantes,
- une stratégie politique recentrée sur l’autosuffisance via des mesures tarifaires.
L’ensemble révèle une vulnérabilité stratégique dans un contexte de transition énergétique mondiale et de compétition géoéconomique croissante.
1. Contexte & enjeux
Le cuivre est un métal industriel essentiel pour les infrastructures modernes, la transition énergétique et les technologies numériques. En 2024, la consommation mondiale de cuivre s’élevait à 27 millions de tonnes et devrait atteindre 33 millions en 2035, puis 37 millions en 20501. Cette croissance est principalement portée par les véhicules électriques, les énergies renouvelables et les centres de données. Un véhicule électrique contient trois à quatre fois plus de cuivre qu’un véhicule thermique, et les réseaux électriques modernes requièrent des volumes importants de ce métal1.
Les États-Unis, bien qu’étant le cinquième producteur mondial, affichent une dépendance nette aux importations de cuivre estimée à 45 % en 20242. Cette dépendance s’est aggravée au fil de la dernière décennie, les importations ayant été multipliées par six depuis 2014, tandis que la production intérieure reculait de 20 %3. Le pays dispose pourtant de réserves minérales abondantes et d’une base industrielle minière significative. Ce paradoxe s’explique par un déficit chronique de capacités de fusion et de raffinage. En 2025, seules deux fonderies primaires sont en activité sur le territoire américain2.
La décision du Président Trump, annoncée le 9 juillet 2025, d’imposer un tarif de 50 % sur les importations de cuivre à compter du 1er août, marque un tournant dans la politique industrielle américaine. Cette mesure vise à réduire la dépendance étrangère, renforcer la production nationale et rétablir une souveraineté économique. Elle s’inscrit dans une stratégie plus large de sécurisation des chaînes d’approvisionnement critiques, initiée dès le début de son second mandat.
2. Analyse détaillée
Les États-Unis importent la majorité de leur cuivre raffiné depuis l’Amérique latine, principalement du Chili (65 %), du Canada (17 %) et du Mexique (9 %)2. En 2024, le pays a consommé 1,6 million de tonnes de cuivre raffiné, contre une production nationale de seulement 890 000 tonnes2. L’écart est comblé par des importations de cuivre transformé à l’étranger, y compris à partir de minerai extrait aux États-Unis. Ce phénomène, qualifié de « commerce circulaire », oblige le pays à expédier ses concentrés de cuivre hors territoire pour traitement, avant de les réimporter4.
Ce modèle présente trois types de coûts : économiques, environnementaux et stratégiques. Sur le plan économique, le traitement à l’étranger représente une perte estimée entre 200 et 300 millions de dollars par an4. D’un point de vue environnemental, il génère 500 000 tonnes de CO2 supplémentaires annuellement4. Enfin, sur le plan stratégique, il expose la chaîne d’approvisionnement américaine à des risques géopolitiques et logistiques majeurs.
La production minière, concentrée en Arizona (70 % du total), a reculé de 3 % en 20242. Cette baisse s’explique par des teneurs en minerai plus faibles et des restrictions opérationnelles. Parallèlement, les grands projets d’expansion comme Resolution Copper restent bloqués par des délais réglementaires ou des contentieux fonciers avec des communautés autochtones5. Le développement de nouvelles mines aux États-Unis nécessite souvent plus de dix ans, et les investissements dans des installations métallurgiques modernes atteignent 2 à 4 milliards de dollars par site4.
La reprise de certaines capacités (Kennecott dans l’Utah) et les projets de nouvelles raffineries secondaires ne suffisent pas à compenser les lacunes du système actuel. La faible capacité de traitement empêche l’exploitation efficace des ressources domestiques, surtout face à la baisse généralisée des teneurs en minerai, qui nécessite davantage de traitement pour des volumes constants de cuivre raffiné2.
L’annonce du tarif de 50 % sur les importations a déclenché une série de réactions immédiates sur les marchés. Les prix des contrats à terme ont atteint un record de 5,95 $/livre, avant de redescendre sous les 5,50 $ à la mi-juillet, reflet d’un effet de stockage massif et d’une anticipation des hausses de prix56. Les ports de Houston, Newark et Los Angeles ont vu un afflux de cargaisons importées, signe que les acheteurs cherchent à sécuriser leurs approvisionnements avant l’entrée en vigueur du tarif7.
Cette dynamique crée un « paradoxe du stockage » : le tarif, censé encourager la production nationale, provoque une accumulation excessive de stocks importés, entraînant des distorsions de prix et une instabilité de marché. À long terme, ce mécanisme pourrait pénaliser les industriels américains qui subiront une hausse durable des prix de leurs intrants, sans bénéficier nécessairement d’une offre nationale suffisante. Le différentiel de prix entre le COMEX et le LME a dépassé 25 %, créant une désynchronisation des marchés de référence5.
En parallèle, la Chine continue de dominer l’ensemble de la chaîne de valeur du cuivre. En 2024, elle représentait plus de 45 % du cuivre raffiné mondial, soit six fois la production du Chili7. Elle consomme près de 60 % du cuivre raffiné global et a importé 60 % du minerai et des concentrés disponibles sur les marchés8. Les investissements dans le cadre de la BRI (24,9 milliards USD au S1 2025) témoignent d’une stratégie d’expansion continue, notamment dans des pays riches en ressources comme le Kazakhstan9.
Les tarifs américains, bien qu’ils visent à renforcer l’industrie nationale, pourraient en réalité favoriser la Chine. En réduisant artificiellement la demande américaine sur les marchés mondiaux, ils permettent à la Chine d’acquérir du cuivre à des prix inférieurs10. Le risque est donc double : une perte de compétitivité des industriels américains et un renforcement indirect du leadership chinois.
Le recyclage joue un rôle significatif dans l’approvisionnement national (35 % du cuivre en 2024), mais ses perspectives de croissance sont limitées2. La durée de vie moyenne du cuivre dans les équipements (environ 20 ans) freine la récupération rapide de volumes significatifs1. Le recyclage reste cependant une composante stratégique, notamment à travers les efforts d’extraction urbaine et les acquisitions ciblées (ex. Metallix par Sibanye-Stillwater)11.
Enfin, plusieurs initiatives publiques cherchent à corriger les déséquilibres actuels. Le programme 48C prévoit 10 milliards de dollars de crédits d’impôt pour les projets liés aux matériaux critiques12. Le ministère de l’Énergie (DOE) gère un programme dédié aux matériaux stratégiques avec 425 millions USD de subventions ciblées13. Le projet de loi « Critical Mineral Consistency Act » vise à harmoniser le statut du cuivre comme minéral stratégique reconnu14. Malgré ces efforts, l'atteinte d'une autosuffisance complète demeure improbable à moyen terme.
3. Synthèse & recommandations
Les États-Unis affrontent un déséquilibre structurel entre leur capacité d’extraction de cuivre et leur aptitude à le transformer localement. Cette vulnérabilité est exacerbée par une dépendance excessive aux importations de cuivre raffiné et une incapacité à développer des infrastructures métallurgiques suffisantes. La stratégie tarifaire actuelle vise une relocalisation industrielle rapide, mais risque d’aggraver les tensions commerciales et de créer des distorsions durables de marché.
L’analyse suggère que seules des mesures intégrées, traitant simultanément les enjeux miniers, industriels, environnementaux et diplomatiques — permettront de bâtir une chaîne d’approvisionnement nationale résiliente et compétitive.
Sources citées
Footnotes
-
https://carboncredits.com/copper-demand-set-to-hit-37m-tonnes-by-2050-can-supply-keep-up/ ↩ ↩2 ↩3
-
https://pubs.usgs.gov/periodicals/mcs2025/mcs2025-copper.pdf ↩ ↩2 ↩3 ↩4 ↩5 ↩6 ↩7
-
https://discoveryalert.com.au/news/proposed-us-copper-tariffs-2025/ ↩
-
https://discoveryalert.com.au/news/americas-copper-supply-chain-imbalance-2025/ ↩ ↩2 ↩3 ↩4
-
https://discoveryalert.com.au/news/us-copper-supply-chain-2025-imports/ ↩ ↩2 ↩3
-
https://carboncredits.com/rio-tinto-antofagasta-lead-copper-surge-but-trumps-tariff-threat-casts-a-shadow/ ↩
-
https://www.cato.org/blog/copper-tariffs-are-new-steel-tariffs ↩ ↩2
-
https://unctad.org/publication/global-trade-update-may-2025-critical-minerals-copper ↩
-
https://blogs.griffith.edu.au/asiainsights/china-belt-and-road-initiative-bri-investment-report-2025/ ↩
-
https://aier.org/article/why-trumps-copper-tariffs-will-hurt-us-industry-and-help-china/ ↩
-
https://www.resource-capital.ch/en/news/view/sibanye-stillwater-to-acquire-us-metals-recycler-metallix-enhancing-its-global-recycling-footprint/ ↩
-
https://www.energy.gov/infrastructure/qualifying-advanced-energy-project-credit-48c-program ↩
-
https://www.energy.gov/cmm/critical-minerals-and-materials-program ↩
-
https://source.benchmarkminerals.com/article/critical-mineral-consistency-act-targets-copper-status-upgrade ↩
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